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Wikileaks publie du nouveau sur le traité de libre-échange des services, TISA
Ce n’est qu’à coups de fuites « Wikileaks » que les détails concernant l’accord de libre-échange des services, TISA, actuellement en cours de discrète négociation par l’administration Obama, sont parcimonieusement lâchés au public. Wikileaks vient de publier 17 documents qui révèlent l’ampleur du traité, qui couvre selon cette source 80 % de l’économie américaine, tandis que les pays parties représentent les deux tiers du PIB mondial. TISA s’ajoute aux deux autres traités libre-échangistes en cours de négociation : le traité trans-Pacifique (TPP) et le TTIP (le traité transatlantique).
Avec le Trade in Services Agreement (TISA) se complète ce que Wikileaks qualifie de la « Trinité des traités » – TISA, TTIP et TPP – dont toutes les composantes excluent aujourd’hui les BRICS : Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Mais si on a beaucoup parlé, en Europe, du traité transatlantique, en soulignant à juste titre ses dangers pour le Vieux Continent, TISA est moins évoqué. C’est pourtant, et de loin, le plus important des trois traités en termes de volumes des échanges.
TISA : libre-échange des services des Etats-Unis, de l’UE et 23 autres pays
De fait, les Etats-Unis et l’Union européenne ont déjà des économies largement appuyées sur les services qui y représentent 80% du PIB. S’y ajoutent, dans le cadre des négociations TISA, 23 autres pays parmi lesquels le Mexique, la Turquie, le Canada, l’Australie, le Pakistan, Taïwan, la Suisse, le Japon et Israël – et même dans un pays comme le Pakistan, les services représentent déjà 53% du PIB. Et la disparité des coûts salariaux, des infrastructures, des régimes fiscaux est tout aussi importante dans le domaine des services que dans celui de la production industrielle…
Les services en question, et qui pourraient donc être échangés sans frein au niveau mondial parmi tous ces poids lourds de l’économie sont ceux des transports – maritime et aérien –, les « services professionnels » (professions juridiques, comptables, services des impôts (!), architectes, ingénieurs, vétérinaires, établissements d’éducation privée…), la santé, les télécommunications, l’e-commerce, la « transparence », la livraison de marchandises… Mais aussi – souvenez-vous du plombier polonais ! – des travailleurs qui se déplacent temporairement à l’étranger pour proposer des services.
La circulation des données personnelles sur internet d’un pays à l’autre serait elle aussi libéralisée, selon des groupes de sauvegarde de la neutralité du net.
Wikileaks a révélé l’existence de TISA en 2014
C’est sur les négociations domaine par domaine que portent les documents internes « fuités » par Wikileaks, détaillant au passage quelles sont les oppositions, les points d’achoppement, et l’état des marchés dans divers pays.
L’existence de TISA n’est pas secrète et on sait, par exemple, que des négociations sont menées actuellement dans le cadre de l’OCDE. Mais ce que les négociateurs cachent systématiquement au public, ce sont les termes même des accords projetés – sous prétexte, comme toujours, que l’affaire n’est pas conclue et que le secret est nécessaire à la liberté et à l’efficacité des pourparlers. Mais – on l’a vu de manière éclatante avec le traité de Schengen, par exemple – la négociation sous cap permet d’arriver avec un document définitif, à prendre ou à laisser et bénéficiant d’une énorme force de frappe. Et il est trop tard pour protester.
L’été dernier, Le Monde publiait ainsi certaines dispositions en cours d’adoption comme celui organisant une libéralisation par défaut : le traité TISA vise à instaurer le libre-échange systématique des services, par défaut, et seuls seraient exclus les services nommément désignés. Toute mesure de protection, qu’elle soit ou non discutable, allant du monopole d’Etat au maintien de protections douanières et à l’imposition de normes perçues comme protectionnistes. Les exemptions devront être négociées. La mécanique est bien plus libérale encore que celle de l’OMC mais concerne un bloc de pays qui semble ainsi s’opposer aux BRICS. Mais qui ouvre la voie, malgré tout, à une future « intégration » mondiale puisque les grands accords peuvent ensuite donner lieu à des traités réciproques.
Du nouveau sur TISA : Wikileaks révèle des négociations branche par branche
Ironie des choses : les documents internes mis en ligne en juin 2014 par Wikileaks soulignaient l’importance du secret et prévoyaient la mise sous clef en lieu sûr des textes relatifs aux traités TISA lui-même et aux négociations, en même temps qu’ils annonçaient la mise en place d’un système de commerce libre et de régulations « transparent ».
Il est intéressant de noter que si bien des groupes européens attachés à la souveraineté et au principe de préférence nationale voient dans le traité transatlantique un moyen d’inféoder les pays de l’Union européenne aux Etats-Unis, la droite américaine elle-même perçoit ces traités de libre-échange, et notamment TISA, comme de réels dangers pour l’économie américaine, riches de menaces pour le peuple américain.
TISA pourrait bénéficier de la même loi « Fast-track » sollicitée par Obama pour permettre les négociations et l’adoption rapides des traités de libre-échange, laissant aux élus du peuple américain la seule possibilité d’accepter ou de refuser en bloc les textes après négociation.